De la "photo au charbon"                            à l'héliochromie aux gélatines

 

   Louis Ducos du Hauron vient de démontrer, en 1869, le bien-fondé de sa théorie des trois couleurs. Certes, il est un peu hésitant sur les nuances à adopter, autant pour ses filtres que pour ses monochromes, mais ça marche ! Et lorsqu'il superpose ses trois micas : les couleurs apparaissent dans toute leur splendeur.

 

 

C'est la période des fameuses vues d'Agen.

Ci-contre, un portrait de Louis Ducos

pris, en 1877, par le photographe agenais

Joseph Lacroix.

Après la "diapo", la photo-papier

Au Musée d'Orsay (ou C2RMF) ont été restaurées quelques très rares épreuves (SFP) de l'opérateur Klerjot. Elles sont datées de 1876.
Au Musée d'Orsay (ou C2RMF) ont été restaurées quelques très rares épreuves (SFP) de l'opérateur Klerjot. Elles sont datées de 1876.

   Même si, dès le départ, il a cherché à produire ses héliochromies sur papier, et non sous forme de sandwich à observer par transparence, il semble qu'il ait eu des difficultés à y parvenir. Pour cela, il a bien envisagé d'adapter les divers processus d'imprimerie à la couleur. Blanquart-Evrard à Lille ou Artigue à Bordeaux réaliseront des essais de tirages lithographiques... mais lui, il ne se sent pas prêt... pas armé. Il va donc utiliser ce qu'il connaît et qui est dérivé de la fameuse « photo au charbon » inventée par Poitevin.

   Comme pour ses essais de 1869, il remplace le carbone par des colorants (rouge, jaune, bleu) et superpose – sur le même support – ces fragiles couches de gélatine colorée. Pendant une dizaine d'années, il va utiliser – et perfectionner – ce procédé. C'est la période des fameuses vues d'Agen, de 1874 à 1877.

   Si vous ouvrez le PDF qui détaille sa technique, vous comprendrez pourquoi il fut pratiquement le seul à l'utiliser. C'est très long et très méticuleux ! Et même le photographe réputé qu'est Henri Klerjot (qui viendra se former à Agen) ne produira que des exemplaires médiocres pour l'exposition de 1876 au Palais des Champs-Élysées. Pourtant, lorsqu'elles sont réussies, ces héliochromies aux gélatines sont, parait-il, magnifiques. Nous ne pouvons juger aujourd'hui que d'après les spécimens que nous connaissons (ceux du musée d'Agen par exemple), très fragiles et qui ont mal vieillis.

Ci-dessus, une série d'héliochromies aux gélatines dont la plus réussie est cette célèbre nature morte du coq et perroquet, ainsi que des vues d'Agen prises de 1874 à 1877. Images que l'on confond souvent avec des tirages ultérieurs (ci-dessous, d'après les mêmes négatifs) mais par la technique de la phototypie. Ceux-ci (aux encres d'imprimerie) sont nettement mieux conservés (Musée d'Agen).

Vert et rouge : gagner en sensibilité

Voici à quoi devait ressembler le laboratoire de l'alchimiste Ducos (Maison de Niépce à St-Loup-de-Varenne).
Voici à quoi devait ressembler le laboratoire de l'alchimiste Ducos (Maison de Niépce à St-Loup-de-Varenne).

   Louis Ducos avait été attaqué sur le fait que les émulsions de l'époque n'étaient guère sensibles qu'aux radiations bleues. Il en était conscient et il s'était penché sur le problème. En moins de dix ans, informé des découvertes des autres chercheurs et grâce à quelques produits miracles (aurine, chlorophylle, éosine), il va changer la donne. Et les temps de pose qui étaient de deux heures pour le rouge vont tomber à quelques minutes... et quelques secondes pour le vert.

   Sa contribution à l'amélioration des surfaces sensibles a été déterminante. Elle est aujourd'hui ignorée.

   Il peut désormais envisager de prendre les trois clichés en une seule opération... à travers trois filtres différents : vert, orangé, violet. Et il se fait construire divers appareils pour y parvenir.

Un nouveau cocktail de gélatines...                       ... et encore une occasion ratée

   En ce qui concerne la couleur de ses gélatines monochromes, il se rapproche de notre système CMJ (cyan, magenta, jaune). Il fabrique ses « papiers mixtionnés » pour opérer les transferts et nous détaille les opérations dans son traité de 1878 intitulé : « Traité pratique de photographie des couleurs ».

   À l'occasion de l'Exposition Universelle de cette même année 78, Louis Ducos démontre que sa technique est au point. Sa production est remarquée : « Ces spécimens, les uns de vues d'après nature, les autres de reproductions de peintures, sont simplement admirables ». Remarquée par le plus illustre photograveur et imprimeur européen, Albert de Munich. Celui-ci propose à Louis Ducos de s'associer afin de fonder un atelier consacré à la photographie en couleurs. L'affaire ne peut se conclure en France et notre inventeur renonce à s'expatrier.

   Encore une fois, il laisse passer sa chance, et ne profitera pas du développement industriel de son invention.

L'Exposition Universelle de 1878 (Champ-de-Mars sans la Tour Eiffel) où Louis Ducos du Hauron aurait pu conclure avec Albert, le célèbre imprimeur de Munich.


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De la photo "au charbon" à l'héliochromie aux gélatines
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